Ce n’est pas un cuisinier, mais un militant inquiété qui s’est exprimé ce lundi 1er avril à la matinale de France info. Le chef a posé son tablier pour endosser sa fonction de président de l’UMIH ( Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie ) et donner une voix à un milieu sous une tension grandissante à l’approche des Jeux Olympiques 2024 à Paris
Les restaurateurs et hôteliers sont officiellement inscrits comme athlètes paralympiques, puisqu’eux aussi se préparent à une épreuve décisive, et ce amputés de nombreux membres. En effet, les semaines qui les attendent seront sportives, avec un nombre de spectateurs attendus aux Jeux Olympiques dépassant les 15 millions sur le territoire français. Autant de passionnés, d’affamés, de fatigués, qui à la fin des épreuves, auront besoin besoin d’un verre ou d’un repas, et assurément d’un toit. L’État le comprend et répond aux demandes; on libère des logements et on donne aux terrassesparisiennes une perf d’énergie pour que la fermeture recule jusqu’à 2h du matin, et bien sûr, on recherche du personnel.
Le chef étoilé Thierry Marx sait que cette demande, le milieu de la restauration ne pourra pas y répondre : « L’ensemble de la France est en manque« . C’est ce qu’il déclare à France Info, nous avertissant sur une situation qui s’avère très tendue. Plus de 200 000 postes restent à pourvoir en cuisine et dans les hôtels, postes qui ne semblent pas pouvoir être occupés de si tôt. Ce vide peu remarqué, dû à l’abondance des préparatifs, est pourtant un gouffre qui s’est creusé depuis longtemps, à cause de mécanismes structurels qui, comme le dit le chef, « ne fonctionnent plus« . On ne parle donc pas d’une situation récente, mais de problèmes présents depuis des décennies, de vielles raideurs dans des politiques d’emploie pas assez flexibles qui les ont rendues inefficace. Ni idiopathiques ni nocturnes, ces crampes du système portent toutefois des noms, et le chef Marx les donne; « les problèmes de logement« , « la taxation du travail » et « le déclindémographique«
Pas besoin de médecine pour expliquer ces maux, le chef cuisinier s’y attelle avec brio. Il met en parallèle les postes saisonniers toujours vacants avec les logements qui eux, ne se libèrent plus, à cause d’une nouvelle organisation des locations. En privilégiant les vacanciers et la clientèle de passage et en leur octroyant la majorité des meublés touristiques, on a privé les saisonniers de leurs opportunités de mobilité et donc de travail.
Autre problème, même s’ils arrivent jusqu’à ces opportunités, les rémunérations qui les attendent les font repartir. Ce ne sont pas des salaires qui sont trop bas, Thierry Marx fait remarquer que ces derniers ont augmenté de « 16% » sur la période post COVID, mais plutôt un écart revenu brut/net qui est trop haut. » Sur 100 000 euros de chiffre d’affaires pour un petit cafetier, il ne lui en reste que 2 000 à la fin du mois« , un constat alarmant pour le chef, qui voit cette différence conséquente comme le moteur de « l’uberisation » de son milieu. Les jeunes talents préfèrent tracer leur route seuls, et pas freinés par le système salarial des cotisations. Certes, ils sont libérés, mais leur indépendance met en péril le futur du secteur entier, de plus en plus désorganisé.
Si l’on revient à l’anatomie, on peut clairement expliquer la dernière tension, le déclin susnommé, mais les détails sont futiles, alors autant se concentrer sur le futur. C’est aussi là que le président de l’UMIH dirige son discours, car on assiste d’après lui à des problèmes généraux, qui concernent « tous les métiers« . Il met en lumière un besoin d’élever le débat, et de chercher des solutions globales. Il accuse les mesures « placebos » du gouvernement, qui ne sont pas viables et souhaite que l’État réalise que l’amélioration de cette situation correspond au sauvetage de sa santé économique et sociale.
« Quelle société veut-on pour dans 10 ans« . Pour le chef Thierry Marx, c’est la question que les décideurs doivent se poser. C’est notre avenir à tous qui est concerné, et qui est menacé par un feu de tensions que la flamme olympique n’a fait qu’attiser. Reste à savoir si quelqu’un se décidera à l’éteindre.