Clap de fin pour la Dolce Vita des loueurs italiens ? Ces derniers viennent de se voir interdire l’usage des “boîtes à clés” alors qu’ils avaient progressivement adopté ce système comme leurs homologues loueurs du reste du monde … D’autres pays européens (dont la France) pourraient emboîter le pas à l’Italie et mettre ainsi un violent coup de botte à cette pratique devenue si courante …
Et si les italiens donnaient le “la” d’une nouvelle mesure restrictive pour les loueurs de meublés touristiques ? Votée le 18 novembre dernier, la mesure est désormais applicable dans toute l’Italie: les célèbres (et récentes) boîtes à clés sont désormais interdites pour les locations saisonnières ! La mesure – radicale – s’applique à tous les types d’hébergements touristiques à court terme et donc, les propriétés listées sur des plateformes comme Airbnb et Booking. La raison ? Elles sont plusieurs en fait :
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Sécurité publique : L’objectif principal est de prévenir les risques liés à l’hébergement potentiel d’individus dangereux ou liés à des organisations criminelles ou terroristes,
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Contrôle d’identité : La mesure vise à garantir une identification visuelle des locataires par les propriétaires ou les “concierges”,
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Lutte contre la prolifération des locations à court terme : L’interdiction se veut aussi une réaction à l’intensification du phénomène des locations de courte durée qui commence, comme en France et ailleurs, à faire se dresser de plus en plus d’opposants de divers ordres,
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Préparation aux événements majeurs : La décision est également liée aux nombreux événements politiques, culturels et religieux prévus, notamment les célébrations du Jubilé 2025 à Rome qui pourraient – comme pour les JO en France – déclencher un fleurissement champignonesque de boîtes à clés dans tout le pays ! Et de tout cela, apparemment, les autorités italiennes ne veulent pas.
Concrètement, cette interdiction – une première mondiale ! – a des conséquences majeures pour les voyageurs et les propriétaires:
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D’une part, les voyageurs devront désormais rencontrer physiquement leur hôte pour récupérer les clés et s’enregistrer. Aucune des deux parties ne pourra donc s’affranchir de cette obligation sous peine de fortes amendes (la loi a été voulue et portée par le ministère de l’Intérieur italien …). L’arrivée discrète à toute heure du jour ou de la nuit et le déblocage d’un boitier grâce au code transmis à distance est désormais banni …
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Comme pour un hôtelier, les propriétaires devront donc vérifier l’identité des invités en personne et s’assurer que tout est en ordre de ce côté …
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Enfin, les informations personnelles et les documents d’identité des voyageurs devront être transmis aux autorités policières dans les 24 heures suivant l’enregistrement.
Autant dire que l’exercice de la location saisonnière va devenir une discipline des plus sportives dans la péninsule !
Pour le maire de Rome, Roberto Gualtieri, dont la ville est saturée de locations saisonnières, “cette interdiction est une bonne nouvelle pour tous”. L’édile prévoit même de mettre en place des équipes et des méthodes pour retirer tous les dispositifs de ce type dans la “cité éternelle”.
Déjà, en ce début d’année, les habitants de sa ville, mais aussi ceux de Florence et de Milan avaient saboté des boîtes à clés pour protester contre le phénomène de la location immobilière et sa tendance à faire grimper les prix de l’immobilier. Depuis plusieurs mois, des manifestations organisées à Rome par des activistes anonymes au nom de Robin des Bois dans des propriétés en location à court terme s’étaient transformées en actes généralisées de “sabotage”.
En octobre dernier, par exemple, des touristes arrivant à Rome pour séjourner dans des locations de vacances ont été surpris de trouver les boîtes à clés murales vandalisées. À la place des dispositifs sécurisés, ils ont découvert des cavités béantes dans les murs, accompagnées d’un message contestataire et d’un chapeau vert en feutre, évoquant le légendaire Robin des Bois. Cette action symbolique s’inscrit, selon eux, dans un contexte de croissance rapide des locations de courte durée dans la capitale italienne: le nombre d’appartements proposés sur des plateformes comme Airbnb a, en effet, plus que doublé en seulement trois ans, passant d’environ 17 000 à un chiffre estimé à 35 000.
De son côté, la ministre italienne du tourisme, Daniela Santanchè, a exprimé son soutien à cette initiative, soulignant son importance “pour garantir une expérience touristique positive et sûre qui ne devrait pas affecter la dynamique économique du tourisme”.
Cette nouvelle mesure – pour le coup, ultra-radicale ! – est un nouveau coup porté par les autorités publiques contre la prolifération des locations saisonnières. Après la France et l’Espagne – qui se veulent en pointe sur ce sujet – l’Italie pourrait être l’initiateur d’un mouvement encore plus musclé pour éradiquer le phénomène par un autre biais que la politique fiscale.
En réponse à cette nouvelle mesure qui pourrait saper son business, Airbnb a exprimé ses inquiétudes en invoquant le fait que les options d’auto-enregistrement (et l’accès via des boîtes à clés) se sont avérées sûres et pratiques pour les hôtes et les invités du monde entier. Depuis cette semaine, Airbnb a exprimé à nouveau son souhait de travailler avec les autorités italiennes pour trouver d’autres solutions “qui répondraient mieux aux préoccupations de sécurité tout en répondant aux besoins de sa communauté”. Pas sûr que les autorités italiennes l’entendent de cette oreille …
Cette réglementation nationale fait suite à des règlementations locales du même acabit prises dans un certain nombre de grandes villes italiennes comme Florence où les boites à clés sont interdites dans son centre historique depuis plusieurs mois. En France, la ville de Marseille a déjà engagé le chantier depuis octobre dernier: pour lutter contre le phénomène, la mairie a donné un délai de 15 jours aux propriétaires pour démonter leurs boites. “Si ce délai n’était pas respecté, les services de la mairie procèderaient en effet à la dépose des boîtes clés” est-il précisé du côté du vieux port. Il faut dire qu’à Marseille, près de 13.000 nouveaux logements ont été proposés à la location saisonnière l’été dernier, soit une augmentation de 45 % par rapport à 2022.
Face à cette évolution incontrôlée, la ville a décidé d’agir vite et fort: pour certains propriétaires déjà touchés par la dépose, leurs boîtes à clés sont désormais récupérables auprès du service des objets trouvés de la ville.
Nul doute que la guerre des boites à clés ne fait que commencer …