Si de nombreuses propositions (suivies d’un couac entre les parlementaires, l’ancien gouvernement et l’administration fiscale) avaient commencé à bien pimenter l’avenir des locations saisonnières, la dissolution et la nouvelle politique de rigueur budgétaire ont fait prendre une tangente inédite à ce dossier quasi à l’état de “serpent de mer”: désormais, le tour de vis fiscal risque aussi de toucher aux plus-values immobilières …
Depuis des mois (voir plus bas), que nous suivons ensemble ce “feuilleton fiscal”, nous nous attendions à de profonds changements, mais pas à ceux qui ont été annoncés cette semaine passée. Désormais, en effet, outre le fait que la révision de l’abattement fiscal sur les revenus locatifs n’est pas encore remis en cause, la plus-value des biens immobiliers jusque là loués en meublés sera plus taxée qu’auparavant.
Selon les dernières propositions de l’actuel gouvernement, dans le cadre des débats budgétaires 2025, en cas de revente d’un bien immobilier jusque là exploité en location meublé, les amortissements de ce bien seront intégrés dans le calcul de la plus-value; ce qui aura pour conséquence d’alourdir le montant de la plus-value réalisée et donc de l’impôt à payer.
Toujours 19% de plus-value mais une assiette plus large
Si la proposition du gouvernement (qui avait été soufflée dans le rapport Le Meur – voir ci-dessus – l’été dernier) était votée en l’état au parlement, il est donc inévitable que revendre son bien immobilier (en location meublée) reviendra plus cher en impôts (plus-value) et ce, dès le 1er janvier prochain.
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Admettons que vous ayez acquis un “appartement à la mer” pour un montant de 122.500 euros: il vous a été possible de déclarer un amortissement annuel de 3.500 euros (sur 35 ans). Si vous revendez ce bien en 2025 à la valeur de 150.000 euros, votre plus-value sera de (150.000 – 122.500 ) 27.500 euros. Avec un taux de 19% (taxation de cette plus value), vous devriez vous acquitter de (27.500 x 19%) 5.225 euros d’impôts. En l’état de la proposition du gouvernement, et si le projet de budget 2025 est voté dans les prochaines jours, il faudra désormais ré-intégrer votre amortissement dans le calcul de votre plus-value. Ainsi, si vous revendez votre bien 8 ans après l’avoir acheté, votre amortissement passé sera de (3.500 euros x 8); soit 28.000 euros qu’il faudra soustraire de votre prix d’achat. Ce dernier passera donc de 122.500 euros à 94.500 euros. Votre nouvelle plus-value sera donc de (150.000 – 94.500) 55.500 euros et votre taxation 2025 sera de (55.500 x 19%) 10.545 euros au lieu de 5.225 euros actuellement …
Selon le rapport Le Meur – publié cet été et qui a vraisemblablement inspiré cette mesure – l’activité de location meublée “peut, tout en présentant un déficit comptable, présenter un bénéfice bien réel pour le propriétaire“. D’où la volonté de rétablir une fiscalité plus équitable avec les autres propriétaires; notamment, ceux qui “louent à l’année”.
Et le rapport de rajouter: “Le mécanisme des amortissements, pour les loueurs LMNP, fait donc office en l’état d’un pur mécanisme de réduction d’impôts, et aucunement d’un processus comptable visant à représenter avec sincérité la valeur d’un bien – en l’occurrence, sa dégradation (…) Ainsi, les amortissements permettent au propriétaire non seulement d’échapper à toute imposition pendant la durée de location du bien, mais aussi de se constituer un patrimoine.”
A priori, selon les promoteurs de cette mesure, il était surprenant, en effet, qu’une activité généralement déficitaire (la location meublée) puisse avoir la faveur des investisseurs: c’est, comme l’expliquent les experts comptables spécialisés dans les logements meublés, que le déficit que dégagent généralement les activités de location meublée “est un déficit comptable et non un déficit économique“.
Si cette réforme de la plus-value sur les locations meublées ne semble pas trop faire l’ombre d’un doute (dans le prochain budget), rien n’a encore été précisé quant au devenir de l’abattement fiscal dont la dernière actualité se résumait en un “coup de rabot” sans précédent.
Pour rappel, les parlementaires (depuis, renouvelés dans leur mandat post-dissolution) souhaitent instaurer un nouveau régime du micro-foncier dit “unifié” qui serait simplifié avec un plafond relevé à 30 000 euros et un taux d’abattement unique (de 30% ou 50% selon les scénarios) pour toutes les locations non professionnelles. Sur ce point, les débats parlementaires et budgétaires risquent encore de réserver quelques surprises dans les prochains jours …
Si les propositions budgétaires actuelles ne lèvent pas encore le voile sur ce sujet, il ne serait pas incohérent de penser que cela résulterait du fait que le nouveau gouvernement considère comme acquis les changements déjà votés l’hiver dernier?
En tous les cas, les changements annoncés sur le régime des locations meublées (saisonnières – ce qui nous interesse vraiment – ou à l’année) peuvent littéralement bouleverser le marché de l’offre touristique française en raison de l’impact de ces mesures sur le volume d’offres locatives. Avec pour conséquence immédiate en vue de la saison 2025 de renverser la vapeur après ce “tsunami fiscal”.
Car, c’est bien de tsunami que l’on peut parler pour la bonne et simple raison qu’on le voit arriver de loin: depuis plus de deux ans, les propositions (transpartisanes, en plus) des parlementaires se multiplient pour limiter l’impact des locations saisonnières qui se développent trop – selon députés et sénateurs de tous bords – au préjudice de la location à l’année et donc, de la “population locale”. Avant la dissolution et les coupes budgétaires, la question semblait relever de l’anecdote: depuis cette fin d’été, elle semble s’être imposée comme une des mesures incontournables du redressement budgétaire du pays …