Il va falloir vous habituer à cet acronyme – DMA ! pour Digital Market Act – car le nouveau règlement européen (entré en vigueur ce 7 mars) va devenir un sujet de discorde hautement inflammable entre Google et les OTAs … Cette semaine, les principales plateformes de voyages ont carrémment dénoncé Google auprès de la Commission Europénne …
La lettre ne comporte qu’une petite page, mais elle contient son propre pesant de vitriol. Rédigée sous l’entête du “EU Travel Tech” (voir plus loin), l’objet de la lettre adressée à Thierry Breton et Margrethe Vertager (tous deux commissaires européens) est direct et sans appel : “Google Search n’est pas conforme à la DMA. Nous demandons instamment à l’Union européenne d’agir“. Rien de moins …
Et de préciser que “avec 300 à 400 millions d’utilisateurs mensuels actifs et 90% de parts de marché (NDLR: en Europe), Google est devenu le principal moyen de recherche d’informations en ligne”. Ce qui en fait (voir notre article précédent) un gatekeeper évident aux yeux du nouveau dispositif européen. Cependant, selon les membres de l’EU Travel Tech, en dépit de l’application obligatoire du règlement européen depuis ce 7 mars, “Google continue à privilégier ses propres services d’intermédiation sur la page de résultats (…). Dans les voyages, cela inclut l’affichage des produits de comparaison de Google pour les hôtels, les vols, les activités et les loisirs, les trains et les locations de vacances, avec des unités plus proéminentes, interactives et riches que n’importe quel autre résultat de recherche“.
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L’EU Travel Tech est un groupe d’entreprises qui rassemble de très gros acteurs comme Airbnb, Booking, Amadeus, Odigeo, Expedia, Skyscanner, Travelport … Comme tout “lobby” son siège est basé à Bruxelles.
Pour les membres du “lobby” européen de la Travel Tech (voir plus bas), “les résultats de recherche organiques (NDLR: les résultats dits “naturels” ou sans lien avec de l’achat de lien sponsorisé) sont de moins en moins visibles, tandis que la page est remplie de contenu appartenant à Google”. Ce qui revient, selon les auteurs de la lettre, à dire que “l’expérience des utilisateurs s’en trouve amoindrie et ils ont moins de choix”.
Pour les membres de l’EU Travel Tech, “Google devrait immédiatement proposer des nouvelles présentation de ses résultats de recherche pour le voyage qui respectent le DMA” et de demander “l’ouverture immédiate d’une enquête” à la Commission Europénne.
Evidemment, Google ne reste pas sans réagir face à de telles accusations. Ainsi, en réponse à la lettre de EU Travel Tech, un de ses représentants a déclaré jeudi que l’entreprise avait effectué “d’importants changements dans la manière dont elle présente les résultats de recherche, cherchant à équilibrer les intérêts des consommateurs, des hôtels, des compagnies aériennes et des concurrents”.
“Les récents changements apportés à la page de résultats de recherche sont significatifs, notamment avec l’introduction d’unités dédiées aux services de comparaison”, a précisé Google.
Google a aussi affirmé que, depuis ces changements, il avait remarqué une augmentation significative des clics (gratuits) vers les pages des agences de voyages et des plateformes de comparaison en ligne comme Trivago.
En raison de ces évolutions, selon Google, les sites (directs) des hôtels, des compagnies aériennes et des restaurants devraient, cependant, subir une baisse significative de leur trafic “naturel”.
Ces réponses sont loin de calmer la grogne qui monte. Aux dénonciations de l’UE Travel Tech devraient se joindre prochainement des initiatives plus politiques. Le Sénat français, par exemple, envisage de saisir aussi la Commission européenne pour dénoncer les conséquences des changements opérés par Google, suite à l’entrée en vigueur de la DMA: reprenant les arguments de l’UMIH, les parlementaires considèrent que ces nouvelles dispositions nuiraient aux hôtels cherchant à obtenir des réservations directes. Affaire à suivre …