Dans un arrêt rendu le 20 mars 2024, la Cour de cassation a rappelé qu’un fait tiré de la vie privée du salarié ne peut pas justifier un licenciement dès lors que ce fait n’a pas eu d’incidence sur les obligations liées au contrat de travail.
Dans cette affaire, un chauffeur livreur est licencié pour faute grave pour s’être masturbé dans un véhicule mis à sa disposition par son employeur, pendant un temps de trajet entre l’entreprise et son domicile.
Dénoncé par diverses sources anonymes, le salarié va contester son licenciement, licenciement que la cour d’appel va confirmer.
Saisie de l’affaire, la Cour de cassation censure les juges d’appel, rappelant ainsi sa position en matière de faits tirés de la vie privée du salarié comme motif de licenciement.
En effet, l’employeur peut licencier un salarié pour un fait relevant de sa vie personnelle dans deux hypothèses :
- Si le fait cause un trouble caractérisé dans le fonctionnement de l’entreprise au regard de la nature des fonctions du salarié et de la finalité propre de l’entreprise. Tel est le cas d’une salariée qui dénigre publiquement son employeur par des propos diffamatoires en dehors de son temps de travail. Ou du salarié qui tient des propos à caractère sexuel, qui a également des attitudes déplacées, en dehors du temps de travail et hors du lieu de travail, mais à l’égard de personnes avec lesquelles il était en contact professionnellement.
- Si le fait en cause se rattache à la vie professionnelle du salarié en ce qu’il constitue un manquement du salarié aux obligations découlant de son contrat de travail. L’employeur peut alors se placer sur le terrain disciplinaire et prononcer un licenciement pour faute. Ainsi, le licenciement d’un salarié au motif qu’il a conduit son véhicule de fonction sous l’emprise de l’alcool au retour d’un salon professionnel auquel il avait participé sur demande de l’employeur est justifié.
C’est sur cette seconde hypothèse que l’employeur du chauffeur-livreur du cas d’espèce fondait le licenciement de ce dernier.
Mais la Cour de cassation relève que les faits se sont déroulés en dehors du temps de travail, la seule circonstance que le salarié se trouvait à bord d’un véhicule professionnel mis à sa disposition ne suffisait pas à rattacher les faits reprochés à sa vie professionnelle.
La Cour considère que le comportement du salarié n’a eu aucune incidence sur l’exécution de ses obligations liées à son contrat de travail. Dès lors, son licenciement pour faute grave n’est pas justifié. Renvoyée devant une autre cour d’appel, celle-ci devrait dans cette logique considérer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.