MARKETING HÔTELIER : OSEZ PROSPECTER EN ZONE PRIMAIRE !
Avec l’hégémonie d’Internet, on en a presque oublié les bonnes vieilles méthodes de commercialisation hôtelière, presque traditionnelles, qui font encore bien leurs preuves aujourd’hui. Cela peut rapporter quelques points de taux d’occupation en plus. Pas négligeable !
Si 93 % des clients d’hôtels passent par Internet pour rechercher les hôtels où séjourner (clientèle d’affaires et de loisirs confondues) — études Coach Omnium —, les hôteliers peuvent compter encore sur d’autres modes additionnels de commercialisation qui ont des retombées directes et indirectes en termes de ventes de chambres. Parmi eux, on pensera en premier à la prospection auprès des entreprises et agences réceptives en zone primaire.
Pour l’instant, 98 % des hôteliers ont un site internet pour leur hôtel et 86 % animent une page sur les réseaux sociaux (études Coach Omnium). Mais, ils ne sont que 30 % à réaliser des mailings/e-mailings et 5 % à faire de la prospection téléphonique. Et encore, ce n’est que du déclaratif.
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QU’EST-CE QUE LA ZONE PRIMAIRE ?
La zone primaire est le secteur géographique situé autour de l’hôtel : la ville en tout ou partie (selon sa taille) et les alentours. C’est là où se trouvent des entreprises qui nous intéresse. Plus il existe une concentration d’entreprises à proximité, plus la zone primaire est potentiellement prometteuse, en fonction des types d’activités (voir plus loin). Dans tous les cas, la clientèle d’affaires qui a besoin de se loger dans une destination souhaite être hébergée au plus proche de son lieu de travail ou de son lieu de rendez-vous professionnel.
Les hôteliers visent souvent loin pour trouver des clients alors que bien souvent il existe des besoins, souvent ignorés, à deux pas de leur établissement. Beaucoup d’entreprises reçoivent régulièrement ou occasionnellement des visiteurs et ce souvent de manière insoupçonnée. Il peut s’agir de commerciaux, fournisseurs, collaborateurs, dirigeants, clients, stagiaires, chercheurs, franchisés, concessionnaires, etc. Ces derniers ont parfois besoin d’être hébergés pour une ou plusieurs nuits, voire pour des séjours plus longs (par exemple, cadre muté en attendant de trouver son appartement sur place ou technicien pour des interventions durables).
Dans ce cas, l’entreprise peut prendre en charge les frais d’hébergement ou encore être simple prescriptrice en indiquant des bonnes adresses d’hôtels où réserver. En cas de besoins nombreux, il est fréquent de proposer à l’entreprise (ou qu’elle en fasse elle-même la demande) un contrat dit « corporate » ou contrat d’hébergement. En contrepartie d’un nombre plus ou moins important de chambres louées dans l’année par l’entreprise, à réévaluer chaque année, l’hôtelier lui propose un tarif spécial (prix réduit de manière plus ou moins importante selon le volume de chambres occupées), généralement en chambre + petit déjeuner (B & B).
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QUELS TYPES D’ENTREPRISES APPROCHER ?
Ce sont généralement les entreprises inscrites dans le tertiaire qui ont le plus de besoins d’hébergement, celles qui emploient le plus de cadres et de commerciaux : sièges, assurances, laboratoires, automobile, etc. La simple banque au coin de votre rue peut avoir besoin d’héberger des personnes qui lui rendent visite (directeur régional, auditeurs, etc.).
Il ne faut pas chercher uniquement du côté des grandes entreprises. Les plus petites peuvent également avoir des demandes régulières ou ponctuelles en hébergement hôtelier. En revanche, un entrepôt par exemple qui n’aurait que des manutentionnaires ou une usine employant sur place surtout des ouvriers, même avec un nombre important de salariés inscrits sur les listes de la CCI, ne sera le plus souvent pas une cible intéressante.
Mais, il existe également d’autres types d’entreprises qui génèrent indirectement des nuitées hôtelières. Un grand centre commercial voisin ne commandera pas d’hébergement directement, mais par son activité, il reçoit de très nombreux fournisseurs et commerciaux. Ce centre commercial peut alors servir de prescripteur pour votre hôtel. C’est-à-dire qu’il va recommander votre établissement à ces personnes ayant un besoin de logement sur place.
Il en va de même des hôpitaux, cliniques et surtout CHU (Centre Hospitalier Universitaire), lequel est souvent le premier employeur dans une ville moyenne. Outre des visiteurs professionnels liés à la santé et au fonctionnement de la structure (nombreux techniciens, chercheurs, médecins, enseignants, fournisseurs…), un hôtel peut avoir à héberger pour un ou quelques jours des accompagnants de malades ou encore des patients en ambulatoire qui viennent de loin. D’où la création des « hospitels » (lire notre article). À défaut d’être en face de l’hôpital, il faut se faire connaître et faire des offres pour loger ces personnes, quitte à leur proposer un tarif spécial.
Comme pourvoyeurs potentiels de nuitées hôtelières, on trouve également des centres de formation (sans hébergement), les centrales nucléaires (pour les sous-traitants, techniciens, ingénieurs, etc. = gros besoins en hôtellerie) ou encore les chantiers pour loger des ouvriers, artisans et techniciens, intéressés alors pour une hôtellerie super-économique.
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PAS DE DÉCOURAGEMENT !
On ne se doute pas des besoins existants tant qu’on n’a pas réellement contacté les PME-PMI. Il est bien sûr utile de scruter du côté des plus grandes entreprises, mais qui travailleront très certainement déjà avec un ou plusieurs de vos concurrents. Ce n’est pas une raison pour baisser les bras et il se peut très bien qu’elles aient envie de changer de prestataire hôtelier ou d’en trouver un de plus.
Il faut alors mettre en avant vos avantages concurrentiels, qui peuvent être des tarifs plus intéressants que ceux de vos concurrents déjà référencés. Mais pas seulement. On peut savoir ce qu’il faut proposer après avoir interrogé les contacts et cerné leurs attentes.
Si la plupart des entreprises locales n’expriment pas nécessairement une grosse demande en hébergement, l’accumulation de petites demandes — une à trois chambres par mois ou plusieurs dans l’année — n’est pas à négliger non plus. Chaque vente vaut la peine et les petits ruisseaux font les grandes rivières pour conduire à un taux d’occupation significatif.
Les besoins des entreprises peuvent bien entendu également correspondre à des locations de salles (résidentiel, journées ou demi-journées d’études) ou encore des repas si votre hôtel a un restaurant.
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QUELS HÔTELS ?
Toutes les gammes d’hôtels peuvent être concernées par les demandes des entreprises en zone primaire, car les besoins peuvent concerner des publics aux profils et aux budgets très variés, allant de l’employé à héberger jusqu’au VIP. La prospection en zone primaire sera cependant plus aisée par un hôtel plutôt moyen/haut de gamme, et par tout établissement valorisant et bénéficiant d’une bonne réputation, dont la démarche commerciale sera mieux reçue par les prospects. Pour autant, toutes les gammes y compris économiques peuvent intéresser les clients potentiels, selon leur typologie.
Cependant, — est-il utile de le dire ? — si votre hôtel n’est pas en bon état, pas modernisé et peu attractif quelle que soit sa catégorie, il vaut mieux ne pas chercher à réaliser une prospection commerciale en zone de proximité. L’effet boomerang — le contraire de ce qui est recherché — serait immédiat !
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LES FREINS MIS EN AVANT PAR LES HÔTELIERS POUR NE PAS COMMERCIALISER LOCALEMENT
On trouve chez les hôteliers plus souvent des excuses pour ne pas développer de ventes sur le plan local que de bonnes raisons. Généralement, ils citent le manque de temps, l’absence de personnel pour le faire et/ou l’insuffisance de savoir-faire.
En creusant bien, on se rend compte qu’ils n’osent tout simplement pas ou qu’ils perçoivent la prospection commerciale comme dégradante pour leur image. On entend fréquemment « nous avons essayé et cela n’a pas marché, n’a rien donné », « les entreprises (qui ont des besoins en hébergement) passent toutes par des agences » ou « les décideurs dans les entreprises ne se trouvent pas sur place (les décisions se prennent au siège qui est ailleurs) ». Ou encore « les concurrents ont déjà tous signé avec les entreprises ». Balivernes !
On est tenté de demander :
- si cela a été tenté, pourquoi cela n’a-t-il pas fonctionné ?
- qu’est-ce qui empêche de proposer des offres plus avantageuses (pas seulement tarifaires) que celles des concurrents ?
- en quoi est-il impossible de contacter les agences qui s’occupent de la gestion des hébergements pour les entreprises ?
- pourquoi ne pas prendre contact avec le siège (décideur) des entreprises locales pour faire des propositions commerciales ?
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COMMENT S’Y PRENDRE ?
Pour approcher les entreprises, on peut s’y prendre par courrier, par téléphone et/ou par visites de prospection. Les gens sont saturés d’emailings qui atterrissent régulièrement dans les anti-spams. Aussi revenir pour les prospections aux envois postaux valorisants est une bonne méthode. Les envois par emails peuvent faire l’affaire avec les clients que l’on connaît déjà.
Il faut savoir que dans la majorité des cas, pour les petites entreprises, ce sont les secrétaires et assistants(es) de direction qui assurent les recherches, prescriptions et réservations de chambres. Ce sont donc elles(eux), en premier, qu’il faut cibler. Dans les plus grandes structures, il peut y avoir une agence de voyages (implant), un service de voyages, un service des achats ou d’autres services concernés par votre offre.
Attention à la Loi RGPD qui va empêcher de réaliser des e-mailings ou des appels téléphoniques de prospection non sollicités.
En premier, il faut repérer les bonnes entreprises, puis les bonnes personnes à contacter. Des fichiers plus ou moins bien qualifiés existent et peuvent être loués à des prix plus ou moins élevés. Vous pouvez également passer par des réseaux sociaux, comme LinkedIn, pour identifier des contacts. Vous pouvez également utiliser le fichier de votre CCI et le qualifier en faisant téléphoner un(e) collaborateur(trice) pour connaître le nom de la personne (ou des personnes) en charge des locations hôtelières sur votre destination.
Pour autant, il est de plus en plus difficile de passer les barrages téléphoniques dans les grandes entreprises et si vous ne possédez pas déjà le numéro de la ligne directe de vos contacts, vous aurez peu de chance que l’on accepte de vous renseigner au standard.
Il existe ensuite plusieurs approches possibles :
– Téléphoner aux contacts ciblés (préalablement qualifiés) pour connaître leurs besoins et pour ceux qui sont intéressés, les inviter à visiter votre établissement, autour d’un déjeuner (pour les prospects les plus prometteurs), d’un petit déjeuner ou d’un simple verre after-work.
– Organiser une journée portes ouvertes (avec cocktail ou buffet) en adressant des invitations à vos prospects, à partir de votre fichier qui aura encore une fois été qualifié préalablement.
– Prendre rendez-vous, après un appel téléphonique, et rencontrer vos contacts dans leur entreprise. C’est l’occasion de présenter un petit film sur votre hôtel avec votre ordinateur portable et de déposer des documents, voire des goodies. Vous en profiterez bien sûr pour discuter des besoins de l’entreprise, voire de proposer un contrat d’hébergement si nécessaire.
– Organiser une opération de séduction originale qui marquera les esprits. Sans rendez-vous, vous pouvez par exemple faire porter au(x) contact(s) dans l’entreprise par un collaborateur habillé en groom (l’uniforme type, propre à l’hôtellerie) et présentant bien (eh oui !), une tasse et sous-tasse marquées du nom de l’hôtel, avec une carte de compliments (avec vos coordonnées). Le « groom » demande à pouvoir remettre en main propre la tasse aux personnes ciblées (assistante de direction et autres) et sert ensuite un café ou un thé, avant de repartir. Il n’est pas là pour vendre ni argumenter. C’est juste une attention portée aux prospects et assez personnalisée. Bien entendu, la tasse est laissée en cadeau. Reconduction de la même démarche la semaine suivante, avec un panier de viennoiseries fraîches. Il ne vous restera plus qu’à inviter les contacts (qui auront été sensibles à votre geste) pour une visite de votre hôtel par courrier, et conclure la vente ou la prescription. Le succès de cette opération sera garanti et ne représentera qu’un coût modique et peu de temps à y consacrer sur une à plusieurs matinées.
– Organiser des rencontres thématiques. Tous ces prospects et clients, il faut constamment et délicatement les tenir en haleine, en leur adressant régulièrement des informations subtiles sur votre hôtel (mails, newsletters…) : nouveau chef, nouvelle piscine, rénovations… Mais vous pouvez également programmer des événements, tels que des rencontres littéraires, des cocktails pour fêter quelque chose (le printemps, la nouvelle année…), des conférences (en fonction de leurs intérêts), etc. L’ensemble peut être relayé par la presse régionale locale pour renforcer l’image de l’opération et les réseaux sociaux. Certains hôtels ont créé des clubs de secrétaires, mais qui demandent beaucoup d’animations et sont donc difficiles à faire durer efficacement dans le temps. Et aussi, il y a de moins en moins de secrétaires dans les entreprises… C’est l’habitude relationnelle qui fera penser à votre hôtel par vos clients et prospects, avec à la clef des réservations ou prescriptions de chambres, voire de séminaires, le cas échéant. Évidemment, toute fidélisation n’est possible qu’avec une prestation qui donne satisfaction.
– Il n’est pas interdit de récompenser régulièrement les contacts dans les entreprises pour les remercier de travailler avec vous ou encore les prescripteurs. Mais, on évitera les récompenses sous forme d’argent (commissions), qui risquent d’être mal perçues par les entreprises.
Selon les dernières études de Coach Omnium, les hôteliers des grandes villes sont 2 sur 3 à réaliser une commercialisation active, contre 1 sur 5 dans les autres localisations. On imagine très bien que ce ne sont pas les autres — les passifs-attentistes — qui ont les hôtels les mieux remplis et qui obtiennent la meilleure rentabilité.
Si 35 % des hôtels ont jusqu’à 50 % de leurs ventes de chambres qui passent par des OTAs, cela monte jusqu’à 49 % qui ont de 50 % à 90 % de leurs chambres vendues par ce biais.
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MUTUALISER LES MOYENS COMMERCIAUX ?
Une autre solution — idéale sur le papier — consisterait à ce que des hôtels indépendants se regroupent pour employer un commercial de manière collective. Ils se répartissent ainsi par mutualisation les frais de commercialisation et le coût d’un(e) attaché(e) commercial(e). Cette option économique peut être sérieusement convaincante lorsque des hôtels différents se regroupent dans une même destination, mais ciblant les mêmes marchés. Hélas, si cette initiative a déjà pu exister ici et là, elle a tendance le plus souvent à tomber rapidement en échec. Les hôteliers finissent par faire germer un climat de méfiance, les uns accusant les autres de davantage utiliser le commercial au détriment du groupement.
Autres prescripteurs géniaux. Il existe de nombreux autres prescripteurs locaux — professionnels — que l’on a tendance à oublier et qui peuvent générer indirectement des nuitées dans votre hôtel pour les voyageurs de passage, notamment. Ils peuvent aussi diffuser un bon …ou un mauvais bouche-à-oreille. Il faut donc penser à eux. Il s’agit des taxis, des restaurateurs qui reçoivent des touristes ou commerciaux, des commerçants, voire des gérants de stations d’essence… Pour eux aussi, on peut réaliser une journée portes ouvertes. Quant aux taxis dans les petites et grandes villes, il est bien vu de les inviter à prendre à volonté un rafraîchissement ou une boisson chaude. Une méthode qui peut sembler à l’ancienne, mais qui marche encore.
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Mark Watkins