Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, s’est publiquement interrogé sur la “fiscalité (trop) favorable pour les Airbnb”… Cette fois-ci, ce n’est pas la plateforme qui est visée mais les propriétaires de meublés …
Interrogé par Apolline de Malherbe, dans le cadre de l’émission Face à Face sur RMC, le ministre de l’économie a déclaré vouloir s’attaquer à la réforme de la fiscalité des meublés touristiques qu’il juge trop favorable aux propriétaires: “À partir du moment où il y a des effets d’aubaine trop importants, une fiscalité trop favorable, il n’y a pas de raison de garder cette fiscalité qui conduit à des excès” a-t-il souligné.
Cette déclaration fait suite aux nombreuses protestations d’élus locaux (lire notre article) qui affirment, de plus en plus fort, que les locations meublées sont devenues non seulement un “biais de concurrence” pour les hébergeurs marchands (hôtels, maisons d’hôtes, campings …), mais aussi un phénomène contraire au développement de l’habitat permanent.
Pour le ministre de l’économie, ce dernier point est des plus sensibles … et de citer, le “manque accru de logements pour le parc locatif privé dans les destinations touristiques”. Si ce projet de réforme n’a pas encore de calendrier ni ne présente de pistes précises, le ministre s’est déclaré des plus volontaristes: “On s’est déjà attaqué à la restriction de la location de courte durée puisqu’on a réduit la durée à 120 jours. Aujourd’hui, ce qui m’interroge, c’est que nous gardions une fiscalité favorable pour les “Airbnb” …”. Dérrière cette “appelation”, évidemment, le ministre vise tout ce qui, de près ou de loin, concerne la location meublée; c’est-à-dire, pas seulement sur Airbnb, mais aussi sur les sites des ses concurrents (Vrbo, LeBonCoin, etc) ou encore certains propriétaires de gîtes (labellisés ou pas, membres d’une centrale de réservation ou non) … Le risque fiscal est donc ouvert pour un très grand nombre de propriétaires.
Une question de justice fiscale
Pour le ministre de l’économie, cette réforme est d’abord motivée par une question de justice devant le paiement de l’impôt : “Je suis ouvert à une réforme de la fiscalité sur les locations meublées de courte durée … et cette réforme se fera !”==
Pour rappel, Les loyers perçus par les loueurs en meublé sont imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Jusqu’à un certain seuil de recettes annuelles, le contribuable est soumis par défaut au régime dit du “micro-BIC” qui permet de bénéficier d’un abattement forfaitaire de 50% et même de 71% si le logement est classé en “meublé de tourisme”.
Les seuils du micro-BIC ont été revalorisés au 1er janvier 2023 et s’élèvent désormais à 77.700 euros pour la location meublée traditionnelle et à 188.700 euros pour les meublés de tourisme classés.
Ainsi, en 2023, si les loyers (charges comprises) retirés de la location meublée par un foyer fiscal sont inférieurs ou égaux à ces nouveaux seuils, le régime fiscal appliqué par défaut sera celui du micro-BIC (tout en permettant au propriétaire de conserver la possibilité d’opter pour le régime réel si celui-ci est plus intéressant). Attention, toutefois, pour déclarer des revenus locatifs, les propriétaires doivent désormais justifier d’un numéro Siret.
Pour cela, depuis le 1er janvier 2023, les loueurs en meublé doivent obligatoirement déclarer leur début d’activité en ligne via un guichet unique numérique sur le site de l’Institut national de la propriété industrielle (inpi.fr) au lieu de celui d’Infogreffe.
Enfin, les propriétaires qui louent en meublé une partie de leur résidence principale peuvent être exonérés d’impôt sur le revenu sur les loyers perçus à condition de remplir les trois conditions suivantes :
- le local loué meublé doit se trouver dans l’habitation principale du bailleur et il ne doit pas s’agir d’un logement distinct,
- la pièce louée doit constituer la résidence principale du locataire,
- le loyer doit être fixé dans des limites raisonnables soit, pour l’année 2022, sur la base d’un loyer annuel par mètre carré de surface habitable, hors charges, inférieur à 192 euros en Île-de-France et à 142 euros dans les autres régions.
Des mesures qui pourraient être réactivées
Les “meublés touristiques” sont à ce point dans le collimateur des pouvoirs publics que des mesures plus strictes (écartées par les législateurs) pourraient finalement être remises à l’ordre du jour …
C’est le cas de la proposition contenue dans le projet de loi de finances 2023 qui prévoyait de soumettre à la TVA toutes les locations de meublés touristiques et d’exclure du régime micro-BIC les contribuables donnant en location au moins trois meublés de tourisme.
En effet, pour mémoire, une nouvelle proposition de loi “anti-Airbnb” a été déposée à l’Assemblée nationale début février pour demander la suppression du régime micro-BIC pour tous les meublés de tourisme, à l’exception de ceux qui seraient labellisés Gîtes de France; ce qui est combattu par d’autres organisateurs de meublés considérant que le label ne justifie plus d’être un regroupement de propriétaires-agriculteurs devant être fiscalement aidés pour compléter leurs revenus agricoles ….
Cette proposition de loi propose aussi que l’enregistrement obligatoire des meublés de tourisme soit étendu à toute la France (et pas seulement à certaines grandes villes ou stations touristiques) et que les propriétaires ne puissent louer leur résidence principale que 60 jours par an (contre 120 aujourd’hui).
Enfin, Olivier Klein, le ministre délégué à la Ville et au Logement, a re-confirmé la volonté du gouvernement d’élargir l’interdiction de location des passoires thermiques aux meublés touristiques.
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