Le texte voté hier, à la surprise générale (notamment, du gouvernement), dynamite l’abattement fiscal des meublés pour le ramener à “30% pour tous !” et donne aux élus (de toutes les villes et villages) des pouvoirs réglementaires inédits …
Par 100 voix contre 25, hier, les députés ont adopté en première lecture un texte extrêmement dur sur les locations de vacances :
- l’abattement fiscal est ramené à 30% pour tout le monde,
- les plafonds de revenus sont sévèrement rabotés de 188.700 euros à 30.000 euros pour les logements classés et de 77.000 euros à 15.000 pour les non-classés (à de rares exceptions près, voir plus loin),
- la déclaration préalable de mise en location sera obligatoire dans toutes les communes et pas seulement celles qui sont “en tension” immobilière,
- les villes pourront réduire la durée de location de 120 jours maximum à 90 jours,
- les passoires thermiques seront interdites de location,
- les villes (comme à Saint Malo) pourront imposer des quotas d’autorisations de changement d’usage d’un bâtiment vers la location meublée sans risquer de se faire attaquer en justice
- enfin, les députés espèrent que le vote des sénateurs (qui devrait aller en ce sens) permettra d’appliquer toutes ces mesures avant les prochains JO !
En clair, si ce vote est confirmé dans la loi, ça risque de couiner très très dur dans l’univers des locations de vacances.
L’abattament fiscal … abattu !
Si le vote, de décembre dernier, du Projet de Loi de Finances avait laissé passer une coquille ramenant l’abattement de 71% à 30% pour tous les meublés, le gouvernement se disait déterminé à geler l’application de ces dispositions, le temps de corriger cette “erreur matérielle”.
Il faut croire que les députés – emmenés par Annaïg Le Meur (Renaissances) et Inaki Echaniz (PS) – ne l’entendaient pas de cette oreille. ==Hier soir, alors que le gouvernement demandait à temporiser le temps de recevoir les conclusions d’une commission parlementaire (également conduite par Annaïg Le Meu et sa collègue Marina Ferrari), les députés sont passés en force en vue de “remedier (sans délai) aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue”. Et il faut croire que les zones sont tendues un peu partout puisque les députés n’ont accepté que quelques exceptions :
- les locations situées en stations de montagne, où l’abattement sera maintenu à 71% pour un plafond de 50.000 euros annuels de revenus,
- ou les zones rurales “très peu denses”,
Partout ailleurs, ce sera le même régime (fiscal) pour tous ! Ainsi, selon le voeu des députés, dès cette année et comme le PLF en a été voté, ce sera 30% d’abattement et pas un pour cent de plus et des plafonds de revenus revus à la baisse comme jamais:
- De 188.700 euros à 30.000 euros pour les logements classés
- De 77.000 euros à 15.000 euros pour les logements non-classés
A ce train-là – et si le gouvernement ne parvient pas à contrer ce vote – il risque d’y avoir un sacré ménage dans l’univers des locations de vacances que de nombreux propriétaires seraient amenés à quitter en raison d’un environnement fiscal, finalement, beaucoup moins attractif.
Il est important de rappeler à ce stade que les maisons d’hôtes ne sont pas concernées par ces dispositions.
Le Sénat devrait confirmer
Ce vote en première lecture est d’autant plus déterminé qu’il embarque un certain nombre de dispositions que les sénateurs (élus des collectivités) ne devraient pas venir rogner :
- imposer – quelle que soit la taille de la ville – de se déclarer en mairie pour pouvoir louer “en saisonnier”,
- imposer, si nécessaire, des quotas autorisant ou non des propriétaires à transformer une maison ou un local en location saisonnière (ce que les élus demandant sans se faire attaquer en justice),
- interdire la location meublée aux passoires thermiques
Outre ces dispositions qui donnent un plus grand pouvoir réglementaire aux élus locaux, les sénateurs devraient adouber le coup de rabot de leurs collègues députés. En effet, en novembre 2022 déjà, les sénateurs avaient voté à l’unanimité un amendement du (LR) Max Brisson (Pyrénées-Atlantiques) qui ramenait l’abattement fiscal de 71% à 50% … un dernier coup à 30% ne devrait donc pas trop les contrarier.
Le gouvernement, de son côté, aurait aimé un “aterrissage plus doux”: même s’il reste attaché au besoin de réglementer plus sévèrement les locations saisonnières, à la fois pour privilégier l’habitat permanent et satisfaire les revendications des hébergeurs marchands, son intention était de limiter les coups de rabot et d’y aller plus progressivement. De ce point de vue, les députés n’en ont eu que faire et c’est un véritable coup de pression supplémentaire que le gouvernement va devoir essuyer sur ce front …
Avant les JO ?
Si les choses mettent beaucoup de temps à se mettre en place, les députés ne l’entendent pas non plus de cette oreille et, même s’ils avouent n’avoir aucun pouvoir sur les délais de mise en place une fois la loi définitivement votée, ces derniers entendent bien qu’elle soit mise en application et ce, dès cette année, avant les prochains JO.
Arguant du fait que ces dispositions – déjà votées dans le PLF de décembre – sont applicables de plein droit, leur vote d’hier et sa version définitive ne feraient donc que consolider un dispositif fiscal et réglementaire prêt à être appliqué sans délai.
Si Bercy avait reçu des instructions pour “geler” la mise en application de l’abattement de “50% pour tous”, le vote définitif de cette proposition de loi devrait faire sauter tous les verrous et ouvrir la voie à un régime fiscal définitivement moins avantageux pour les locations saisonnières. Cette situation devrait donc entraîner une hémorragie de départs de loueurs (depuis les plateformes, voire de certains labels …) dont les conséquences sont difficilement mesurables, à ce jour, en terme de régulation de l’offre, de la concurrence et des prix. Mais, une chose est certaine : les hébergeurs “marchands” ne devraient y trouver que des bénéfices.
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