La prestigieuse école hôtelière suisse (de laquelle a vocation à sortir l’élite de l’hospitalité mondiale) considère que la période actuelle est marquée par la “perturbation des canaux de distribution” et que, au lieu de s’assomer de soumission aux OTAs, elle offre aux hébergeurs des possibilités de distribution alternative bien plus importantes qu’imaginé …
Certes, vu depuis son hébergement et son compte d’exploitation où s’accumulent de lourdes factures de commissions d’OTAs, la période semble bien moins perturbée pour les grandes plateformes que pour les hébergeurs eux-mêmes. Or, ce n’est pas l’avis de l’EHL (Hospitality Business School) de Lausanne qui, selon ses experts, identifient des perturbations majeures dans les situations que connaissent les OTAs eux-mêmes:
- les 3 grands (Booking, Airbnb et Expedia) se livrent à course sans merci pour amasser le “catalogue” le plus large possible, au point de “chasser” quasiment les mêmes offres (dont les locations de vacances, nouvelle priorité),
- les meta-moteurs de recherche (comparateurs, pour certains filiales des OTAs) occupent une place croissante dans le parcours des réservations et, notamment sous les coups de l’inflation, sont devenus des passages obligés pour les voyageurs à la recherche des meilleurs prix. ==Selon l’EHL, 30% des réservations abouties sur un OTA ou votre propre site proviennent d’un meta-moteur comme Trivago, Tripadvisor ou Kayak …
- ==dans le même registre, les services “maison” de Google dans le voyage marquent un tournant dans la manière de rendre vos offres plus visibles et réservables en direct; ce qui n’a pas manqué de déclencher l’ire des OTAs qui ont fini par adresser une lettre de dénonciation à l’Union Européenne dans le cadre de la récente mise en application du DMA (lire notre article).
Dans ces circonstances, les spécialistes de l’EHL, dont Jochen de Peuter-Rutten, considèrent que les hébergeurs doivent profiter de cette période pour revoir leur stratégie de distribution:
- Sans remettre en cause leur visibilité sur Google ou les OTAs dont la puissance de feu viendrait à manquer à n’importe quelle adresse,
- En développant des stratégies plus avancées sur votre propre site internet comme la mise en place de versions personnalisables (en fonction de l’origine et du profil de vos visiteurs) ou encore en vous équipant de chatbots (forcément très intelligents) pour mieux répondre aux visiteurs de votre site en quête de réponses rapides et précises à chacune de leurs questions,
- En développant, au sein d’un groupement, un programme de fidélisation attractif qui encourage les répétitions d’achats et de réservation,
- et, enfin, en investissant sur les réseaux sociaux (facebook et Instagram en tête) car l’heure est venue de considérer ces supports comme autre chose que des distractions ou des coquêteries … car, selon l’EHL, les réservations via les réseaux sociaux, ça marche !
En clair, selon ces spécialistes, il faut profiter la guerre fratricide que se livrent les OTAs (… et Google) pour redéployer votre stratégie de distribution vers une situation de moindre soumission. Et, donc, investir des champs que vous n’exploriez jusqu’à présent que (très) superficiellement.
Pourquoi les réseaux sociaux en priorité ?
De toutes les solutions alternatives proposées par l’EHL, celle des réseaux sociaux est, de loin, la plus immédiatement pertinente:
- la mise en place de versions personnalisables de votre site (ou encore d’un chatbot) est une opération encore coûteuse et qu’il vous est forcément difficile de gérer au jour le jour,
- la contribution à un programme de fidélisation reste toujours complexe car il vous faut choisir le bon programme, le bon modèle économique (cela peut vous coûter de 8 à 12% de la valeur de vos réservations) et que les retours peuvent ne pas être immédiats pour vous : le principe d’un programme de fidélité est basé sur la mutualisation des moyens entre plusieurs opérateurs et il n’est pas certain que votre mise de fonds vous génère immédiatement des retours sur investissement importants,
Pour les spécialistes helvetes, les réseaux sociaux demeurent un excellent levier car ils ne sont pas très compliqués à comprendre et à maîtriser, le temps nécessaire pour en faire un usage profitable pour votre établissement n’est pas considérable pour peu que vous sachiez vous inscrire dans une bonne “routine” et, enfin, les coûts publicitaires sont très accessibles et facilement identifiables … ce qui vous permet d’espérer gagner de nouveaux clients pour un coût (on appelle cela le CAC pour Coût d’Acquisition Client) moins important que certaines commissions facturées par les OTAs.
Pour le Docteur Meng-Mei Maggie Chen de l’EHL: “Dans les périodes difficiles, les entreprises du tourisme ont réduit leurs budgets commerciaux et marketing. Pourtant, des recherches de la Harvard Business Review ont montré que les entreprises qui investissent dans des périodes difficiles rebondissent plus rapidement. Il ne s’agit pas tant de réduire les coûts d’acquisition de clients que de savoir comment investir dans les canaux les plus productifs et les plus rentables pour obtenir le meilleur rapport qualité-prix.“
La fin du fusil de chasse
Pour les spécialistes de l’EHL, quand il s’agissait des réseaux sociaux (et uniquement pour ceux qui commençaient à en avoir un usage très commercial), “le marketing social reposait sur des campagnes de type “fusil de chasse” alors qu’aujourd’hui, un ciblage précis distribué sur les plates-formes émergentes permet des connexions clients véritablement personnalisées” et qui rapportent des réservations !
==Selon l’EHL, outre le BAba sur facebook et Instagram, les trois meilleurs investissements d’avenir sur les réseaux sociaux sont:
- le développement de communautés sur les réseaux “NextGen”, c’est-à-dire des réseaux comme Reddit, TikTok et Snap qui ouvrent à des communautés nouvelles.
Mais, attention, se “vendre” sur ces réseaux ne consistent pas à sortir les “gros sabots”. Selon l’EHL, il faut savoir “être utile d’abord plutôt que promotionnel, commenter en connaissance de cause sur les discussions locales des autres membres du réseau, sponsoriser des publications géo-ciblées auprès de groupes de niche comme les voyages en famille ou les propriétés acceptant les animaux de compagnie”.
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Il ne faut pas, non plus, négliger vos contenus “tiers”: “Sur TikTok, Snapchat et Instagram Reels, les moments viraux de voyage résonnent. Et, prévient l’EHL, les vidéos de présentation d’hôtels générées par les utilisateurs surpassent les comptes d’entreprise. On constate même la portée des hashtags inclut #hotelsoftheworld et #luxuryhotel ne cesse de croître”.
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Ne pas négliger les annonces Pay-Per-Stay sur Facebook car “les publications de voyages sponsorisées sur Facebook, Instagram et Messenger permettent des promotions hôtelières efficaces. Et, les publicités dynamiques ajustent l’affichage en fonction des actions passées des utilisateurs, proposant des offres très ciblées” qui correspondent aux nouveaux impératifs de personnalisation marketing.
Pour ces spécialistes du marketing de l’hospitalité, sur les réseaux sociaux “classiques”, “il vous est possible d’afficher la page d’un établissement en fonction de ce que l’internaute a visité préalablement. Vous pouvez ainsi afficher une offre spéciale, proposer une meilleure expérience de vente croisée ou encore, grâce aux paramètres de localisation, de déclencher des messages contextuels à l’arrivée des voyageurs dans la zone métropolitaine d’un hébergement”. Et de rappeler que l’outil de planification expert de Facebook conçoit des publicités séquentielles optimales pour déplacer les “invités” tout au long de l’entonnoir de réservation.
En conclusion, selon ces spécialistes, “compte tenu des capacités de ciblage inégalées de Facebook, le paiement au séjour (et non plus au clic) apparaît comme l’option de marketing à la performance la moins coûteuse, désormais étendue aux Stories Instagram et à Messenger”.
La vidéo, si vous en avez
Enfin, dans cette ère du tout-image et des “courts” (shorts, reels, etc), les offres YouTube restent des bons leviers pour générer des revenus à votre établissement … si, bien sûr, vos vidéos valent le détour !
Selon l’EHL, “les éditeurs de voyages génèrent des milliards de vues sur YouTube chaque année. Les taux de conversion sont favorables dans de nombreux secteurs. Pour les hébergeurs qui investissent dans YouTube, cela pourrait être particulièrement gratifiant, car le contenu se prête si bien au format vidéo. Avec YouTube qui facture uniquement lorsque les spectateurs acceptent les publicités désactivables, les hôtels bénéficient d’un accès abordable à la deuxième plus grande plate-forme de recherche au monde”.
En conclusion, l’OTA n’est pas la seule source de distribution (avec votre propre site, bien sûr) et, compte tenu des redistributions de cartes en cours dans ce domaine, savoir prendre le temps de vous investir sur les réseaux sociaux est, de loin, la meilleure chose à faire cette année.
“Dans un marché de chambres d’écho, les plateformes sociales permettent de véritables connexions avec les voyageurs, leur portée de diffusion étant désormais assortie d’un ciblage précis. Les hébergeurs alliant intelligence des données et développement de contenu créatif peuvent entretenir des relations clients significatives sur tous les canaux” et développer, à court terme, des sources de réservations efficaces et économiquement abordables qui les placent dans une moindre dépendance aux OTAs … et à leurs commissions. À une condition, cependant, que vos CAC sur les réseaux sociaux ne dépassent pas ceux facturés par les grandes plateformes.