La Marine est une institution dans le Cotentin. Construit en 1880, l’hôtel-restaurant de 26 chambres est resté trente ans dans les mains de la famille Cesne, qui l’a fait monter en gamme jusqu’à décrocher une étoile Michelin, conservée pendant trente-sept ans. L’établissement est situé à Barneville-Carteret (Manche), une station balnéaire familiale fréquentée par les Caennais, ainsi que les clientèle anglaise (les îles de Jersey et Guernesey sont toutes proches), américaine, belge et allemande. Le lieu est toutefois préservé de la foule et des températures extrêmes, offrant aux voyageurs un havre de calme dans une nature préservée.
En 2007, Laurent Cesne part à la retraite et cède son affaire à un hôtelier qui rénove l’hôtel pour le faire passer en catégorie 4 étoiles. Malheureusement, en 2022, le chef de cuisine quitte l’établissement juste avant la saison estivale, suivi par plusieurs chefs de service. Suite à des choix de gestion hasardeux, les résultats financiers s’effondrent à la même vitesse que la réputation. L’affaire est au bord de la faillite et finit en redressement judiciaire. C’est alors que trois amis d’enfance, originaires de la région, décident de s’associer pour la sauver, dont Renaud Desfours, propriétaire de plusieurs hôtels et restaurants dans le village.
• S’appuyer sur l’humain
Le rachat a lieu le 6 avril 2023 pour une réouverture en mai. Les associés doivent reconstruire les équipes et remettre en marche l’établissement, heureusement en très bon état. “Le côté humain est au cœur de cette reprise. Lors des recrutements, je demandais à chaque candidat s’il était prêt à se lancer dans cette aventure, car nous avions besoin d’être tous mobilisés autour de ce projet. Depuis, je suis là au quotidien avec les équipes pour leur transmettre cette énergie et notre culture d’entreprise.”
Une vision qui se poursuit au-delà, avec des réunions de service où chacun peut s’exprimer. “C’est souvent à ce moment-là que naissent les idées car les solutions viennent la plupart du temps de l’intérieur. Cela permet aussi de valoriser et d’impliquer chaque membre de l’équipe.”
• Démocratiser le restaurant
L’une des pierres angulaires du projet réside également dans le repositionnement du restaurant de 60 couverts. La direction le rebaptise Marnage, pour rompre avec l’ancien nom et les mauvais avis déposés sur internet. Un nouveau chef est engagé, Victor Leboucher, lui aussi enfant du pays [lire ci-dessous] qui avait fait son apprentissage dans l’une des adresses de Renaud Desfours avant de poursuivre sa carrière dans les tables prestigieuses, notamment Jacques et Régis Marcon et La Bouitte. Il y propose sa vision d’une cuisine locavore, un ‘terroir iodé’, dans une région riche en produits de la mer, fromages, fruits et légumes.
“Il était indispensable de proposer une offre gastronomique le soir pour reconquérir la clientèle qui s’était détournée de La Marine, mais aussi de créer d’autres moments de restauration pour faire entrer la clientèle locale.” En plus du dîner gastronomique (forumes à 59 € et 89 €), se succèdent tout au long de la journée le petit déjeuner (24,5 €) ouvert à la clientèle extérieure, une formule à partager au déjeuner– l’Atelier Marnage –, un snacking chic de 14 heures à 19 heures, et une offre au bar avec l’embauche d’un chef barman passionné de 25 ans, Bastien Lesachey.
Le dimanche enfin, un brunch (59 €) est proposé, avec une animatrice pour garder les jeunes enfants. Sans compter les diverses animations et dégustations organisées avec les producteurs locaux.“Nos établissements permettent de maintenir un lien social, ce n’est pas uniquement des lieux où l’on vient diner”, insiste Renaud Desfours, d’autant que le chef valorise l’approvisionnement locavore de son restaurant.
• Le spa, pilier du développement futur
L’autre grand projet des associés est de créer un spa qui permettra de de renforcer la fréquentation l’hiver et d’allonger la durée de séjour. “Le Cotentin est une région qui a le vent en poupe, et nous souhaitons créer des services supplémentaires afin d’attirer les clients de demain”, détaille Renaud Desfours, qui espère voir aboutir ce projet d’ici trois à quatre ans. Un cercle vertueux pour l’établissement, qui affiche complet pour la saison quelques mois seulement après avoir été au bord du gouffre.