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Après huit ans d’efforts pour digitaliser la billetterie des monuments historiques, l’entreprise Patrivia a annoncé qu’elle fermait ses portes. Entre difficultés financières, inertie institutionnelle et manque de soutien, l’aventure s’est heurtée à de nombreux obstacles. Rencontre avec Christian Clarke de Dromantin, l’un des fondateurs de Patrivia, qui revient sur les raisons de cet échec et les leçons à en tirer.
Nous sommes partis d’un constat frappant : 99% des châteaux et lieux de patrimoine en France n’avaient pas de billetterie en ligne, alors que la majorité des tickets de cinéma ou de théâtre s’achetaient déjà sur internet. Nous avons donc décidé de créer une plateforme pour centraliser l’offre de 2 500 châteaux et 1 200 musées labellisés « Musée de France » ouverts à la visite. Il n’y avait pas d’outil de ce genre dans le secteur, alors que la demande était là. Avant sa fermeture, Patrivia agrégeait l’offre de 600 monuments.
En 2018, nous avons levé 230 000 euros pour lancer le site vitrine. L’année suivante, nous avons scellé un partenariat avec la Mission Patrimoine portée par Stéphane Bern et lancé des initiatives comme le « Pass Patrimoine ». Mais l’incendie de Notre-Dame a eu un impact désastreux sur notre trajectoire. Nous avons perdu un contrat de 800 000 euros une semaine avant la signature, car les priorités des structures patrimoniales ont changé du jour au lendemain. Ensuite, en 2020, en pleine pandémie, nous avons levé 1 million d’euros. Cependant, la fermeture des monuments et les restrictions liées au COVID-19 ont frappé de plein fouet notre activité. Les rayons culturels dans les supermarchés ont fermé au moment où nous nouions un partenariat avec Smartbox. Pendant la crise sanitaire, la gestion des quotas dans les monuments a été un casse-tête. Beaucoup d’entre eux n’étaient pas équipés pour gérer ces restrictions. Il n’existait pas de système centralisé pour suivre les ventes réalisées par les partenaires et gérer les flux. C’est à ce moment-là que nous avons décidé de lancer le premier channel manager dans le secteur culturel pour agréger l’offre des monuments et la redistribuer aux revendeurs.
La création de notre nouveau site internet, qui devait nous connecter aux revendeurs, a pris trois fois plus de temps à développer et a coûté trois fois plus cher que prévu. Le site internet est sorti en février 2024, mais nous n’avons pas réussi à lever des fonds ensuite pour compenser cet investissement. Les investisseurs, dans un contexte de tension lié à la guerre en Ukraine notamment, préfèrent désormais investir dans des entreprises qui sont rentables tout de suite.
En tant que fondateurs nous portons la responsabilité de cet échec car nous n’avons pas su trouver le bon modèle économique pour aller plus loin et nous adapter à un marché complexe. Une startup n’a pas le même rythme qu’un monument historique. Ces lieux sont souvent gérés par des familles depuis des siècles et le secteur public n’a pas les mêmes impératifs de rentabilité que le privé. Nous voulions un modèle d’autofinancement, mais certaines institutions voyaient cela comme une « marchandisation » de la culture. Cela nous a mis des bâtons dans les roues, notamment au niveau du financement.
Oui, avec certains. Le secteur public a une idéologie forte sur la démocratisation de la culture, ce qui est louable, mais parfois déconnectée des réalités économiques. De plus, beaucoup de gestionnaires de monuments publics n’ont pas les mêmes impératifs que les privés. Par exemple, ils peuvent se permettre de mettre des prix bas, ce qui pousse les monuments privés à s’aligner, alors qu’ils n’ont aucune aide pour compenser. Cela a des conséquences néfastes sur l’ensemble du secteur.
Je pense qu’un jour, quelqu’un arrivera à agréger tous les monuments, mais cela prendra du temps. Le secteur est complexe et il n’y a pas encore de grand acteur fort pour faire bouger les lignes. Les gestionnaires de monuments ont souvent bien d’autres priorités que de se digitaliser. Il faudra du temps pour que les choses changent, mais je crois que le potentiel est là.
Le patrimoine est un secteur qui me passionne, mais après huit ans d’efforts, je ne suis pas sûr de rester dans ce domaine. C’est un secteur très complexe et politique. Nous avons permis une certaine digitalisation du patrimoine, mais nous n’avons pas réussi à trouver le modèle économique qui fonctionne. Je suis prêt à explorer d’autres horizons, même si je reste ouvert aux opportunités dans le secteur du patrimoine.
Photo d’ouverture : Aurélien Dockwiller
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