NYC et l’Europe, même combat ? Cette semaine, la nouvelle règlementation new-yorkaise entre en vigueur et va sabrer la dynamique des locations courte-durée tandis qu’en Europe, une TVA est annoncée sur les locations saisonnières pour janvier 2025 … voire, même un peu plus tôt, si l’on en juge la récente décision du Conseil d’Etat en la matière !
Ce n’est plus juste une impression … l’univers des locations de vacances est véritablement en train de “prendre la lumière” et de passer sous les projecteurs des autorités de régulation. Des deux côtés de l’Atlantique, les pouvoirs publics multiplient les actions pour “canaliser” non seulemet un business qui leur échappe, mais aussi pour rétablir un équilibre concurrentiel avec les hébergeurs “marchands” que sont les hôteliers, les maisons d’hôtes, les gîtes et les campings.
Une TVA systématique ?
En Europe, il existe au moins deux grandes mesures qui devraient imposer un modèle de marché mieux contrôlé :
- l’obligation, pour les plateformes de distribution comme Booking ou Airbnb, de “tracer” les offres présentes sur leur site, de bloquer les offres non préalablement déclarées (et sans numéro d’enregistrement) ainsi que les revenus générés pour les propriétaires (lire notre article de la semaine dernière),
- le projet de créer une base de données européennes des propriétaires de meublés saisonniers (ceux qui sont déclarés en bonne et due forme) et la possibilité de tracer les volumes de jours réellement loués d’une plateforme à l’autre, dans la limite des volumes de jours autorisés,
Enfin, la future directive TVA qui va entrer en vigueur en janvier 2025 fixeraot l’obligation aux plateformes d’appliquer une TVA supplémentaire sur toutes les réservations concernant des locations de vacances; (s’agissant d’une directive et donc, d’une transposition pays par pays), ce taux pourrait varier – et donc augmenter le prix des locations – de 20 à 25% ! Autant dire que la différence avec les autres hébergeurs (les “marchands”) deviendrait rapidement ténue …
Actuellement, les locations saisonnières sont, en effet, exonérées de TVA si elles opèrent moins de trois prestations parmi la liste suivante et ce, à la lumière de l’article 261 D du Code Général des Impôts (CGI):
- Proposer le petit-déjeuner,
- Nettoyer les locaux,
- Fournir du linge de maison,
- Assurer la réception de la clientèle.
Cependant, cet été, le Conseil d’État, dans un avis du 5 juillet 2023, a jugé incompatible ce régime avec la directive européenne.
Selon les “derniers juges”, la France doit se conformer aux dispositions européennes dont l’objectif est de soumettre à la TVA les établissements qui fournissent suffisamment de prestations en sus de l’hébergement pour entrer en concurrence avec le secteur d’hôtellerie.
Selon les magistrats du Conseil d’Etat: “Le cumul de trois de ces quatre prestations (voir plus haut) n’apparaît pas systématiquement indispensable pour que de telles locations puissent, selon le contexte dans lequel elles sont proposées, être regardées comme se trouvant en concurrence avec le secteur hôtelier”. Et d’estimer que “des établissements qui réaliseraient moins de trois prestations pourraient être en concurrence avec le secteur hôtelier”.
Par conséquent, selon cette décision, l’administration fiscale doit analyser et déterminer si chaque établissement entre en concurrence avec le secteur hôtelier en tenant compte notamment des prestations réalisées et de la durée minimale des séjours (sans pour autant fixer cette durée minimale, ce qui restera à l’appréciation des contrôleurs fiscaux).
Nul doute que, compte tenu des coups de boutoir de l’Europe pour aller plus loin vers la fiscalisation des locations saisonnières, la France devra rapidement clarifier ces points par une modification de sa règlementation fiscale; peut-être, déjà, cet automne ?..
Une chute sans précédent des annonces sur Airbnb
De l’autre côté de l’Atlantique, à New York précisément, entre en vigueur ce 5 septembre, le nouveau règlement municipal sensé réduire l’importance des locations Airbnb dans la Grosse Pomme.
Ce nouveau règlement oblige les plateformes (Airbnb, mais aussi Booking …) à se connecter à la base de données municipale pour vérifier si telle ou telle chambre est bien enregistrée en mairie et peut être proposée à la location de courte durée. L’interrogation se fait en temps réel (via une API) et si le bien proposé n’est pas enregistré, les plateformes n’ont pas le droit de le diffuser, sous peine de fortes amendes … C’est aussi (voir plus haut) le schéma qui va se mettre en place à l’échelle européenne …
Selon plusieurs relevés, au 28 août dernier, un peu moins de 5% des 9500 annonces auparavant présentes sur Airbnb seraient encore autorisés à y figurer; les autres étant jugées non-appropriées ! Il faut dire que, selon le nouveau rè-glement municipal, il est désormais impossible de louer un logement entier mais seulement une chambre (et sans verrou, s’il vous plaît !) chez l’habitant … les seuls appartements encore présents sur Airbnb étant des chambres entières proposées par des hôteliers (quant à eux, autorisés).
Quant aux propriétaires (ou néo-investisseurs) qui avaient acheté un appartement pour le rentabiliser sur Airbnb, leur projet risque fort de prendre l’eau: à la fin de la semaine dernière, le bureau municipal des locations saisonnières de la mairie de New York avait reçu 3 250 candidatures d’hôtes et n’en avait approuvé que 257 …
Ces mesures (des deux côtés de l’Atlantique) démontrent bien que l’heure de la “régulation” a bel et bien sonné pour les locations saisonnières. Si les motivations sont nombreuses (maîtriser l’offre, privilégier l’habitat permanent et réduire la concurrence avec les hébergeurs marchands), les mesures sont toutes similaires : attaquer le porte-monnaie … des grandes plateformes spécialisées car, dans ce domaine, les propriétaires n’ont que ce moyen pour se distribuer (ils ne possèdent que rarement leur propre site et leur moteur de réservation). A priori, les pouvoirs publics ont bien compris où et comment les prendre à leur propre piège …