Dans une contribution précédente à EHL Insights, nous établissions des parallèles entre le secteur hôtelier et celui des soins de la santé. Nous examinions ce que les hôpitaux peuvent apprendre du monde hôtelier sur le plan stratégique. Dans cet article qui y fait suite, nous nous penchons sur les enseignements potentiels à tirer sur le plan opérationnel. Tout comme les hôtels, les hôpitaux ont une double logique d’accueil de la patientèle, et de fonctionnement interne.
Notre proposition est que la dimension d’accueil d’un hôpital peut bénéficier de la comparaison avec le secteur hôtelier et nous avançons diverses pistes d’enseignements potentiels. Nos recommandations se concentrent sur des améliorations de l’environnement matériel de l’hôpital, sur la qualité et l’étendue des prestations offertes, et enfin et non des moindres, sur une utilisation de technologies de l’information axée sur le service.
Améliorations de l’environnement matériel
Revoir l’agencement et l’esthétique de l’environnement ambiant
De nombreux aspects de l’agencement et de l’esthétique d’un hôpital sont nécessairement fonctionnels par nature. Cependant, les hôpitaux regorgent d’espaces non techniques qui ne sont pas immédiatement destinés aux soins médicaux. Rendre ces espaces plus accueillants est une question dont peu d’hôpitaux semblent se saisir. Les améliorations possibles recouvrent le fait de choisir des gammes de couleurs particulières, le fait de faire entrer plus de lumière naturelle, d’y placer du mobilier confortable et esthétiquement plaisant, etc.
On pourrait même aller plus loin. Pour de nombreuses personnes, ne serait-ce que l’odeur du désinfectant qui semble imprégner tout environnement hospitalier est écœurant. Dans certains lieux elle est inévitable, mais pourquoi ne pas créer un parfum d’ambiance signature dans les lieux qui ne sont pas essentiels d’un point de vue médical ? Et pourquoi ne pas décorer ces espaces publics ? Les possibilités de faire preuve de créativité dans l’agencement des espaces non médicalisés sont innombrables, et le secteur de l’hôtellerie est bien placée pour transmettre ses bonnes pratiques en la matière.
Créer des espaces de tranquillité
Le secteur hôtelier est très au fait de l’importance d’un environnement calme pour le bien-être de ses résidents. Une bonne nuit de sommeil compte parmi les priorités de la plupart des gens logeant à l’hôtel, et un environnement calme en est un prérequis essentiel.
L’environnement hospitalier se caractérise souvent par l’exact opposé. Un arsenal inépuisable de lumières – certaines sont fixes, certaines clignotent, et les appareils qui produisent des bruits sont omniprésents. Puis il y a la désagréable alarme sonore dans le couloir, audible par tous, dès qu’un patient appuie sur le bouton d’appel. Et ne parlons pas du personnel qui bavarde ou même crie à toute heure du jour ou de la nuit. Mais de même que certaines conditions techniques doivent être respectées, les hôpitaux pourraient sans aucun doute consacrer plus d’énergie à la création de lieux calmes et reposants, propices au rétablissement et au bien-être des patients.
Améliorations dans la qualité et l’étendue des prestations offertes
Une restauration plus qualitative
De toute évidence, les repas d’hôpital doivent satisfaire à des exigences diététiques et concourir au rétablissement des patients en termes d’apport nutritionnel, énergétique, etc. Ainsi, certains aliments et boissons y sont parfois proscrits. Cela étant dit, le caractère plaisant de la nourriture et son impact sur le bien-être des patients ne doit pas être ignoré. Manger de bonnes choses, si possible en compagnie de ceux qu’on aime, peut être une source de réconfort et de bien-être émotionnel.
Certains hôpitaux l’ont expérimenté avec succès en transformant leur offre de restauration en quelque chose qui s’apparente plus à de la gastronomie. En matière de restauration, ce que peut nous apporter comme enseignements le secteur hôtelier est évident. Cela concerne les repas en eux-mêmes, mais également tout ce qui se trouve autour, dont les conditions matérielles dans lesquelles les repas sont servis. Pour les patients alités, il y a peu de latitude. Néanmoins pour tous les autres, une salle à manger joliment agencée serait sans doute une alternative bienvenue au fait de prendre ses repas dans la chambre où l’on passe déjà l’intégralité de ses jours et de ses nuits.
Offrir des services de conciergerie
Dans un hôtel, un concierge se charge de toutes les demandes particulières pour garantir à la clientèle un séjour confortable et agréable. Il peut s’agir de réserver une table au restaurant, de commander une course pour un déplacement particulier, ou encore de trouver des billets pour un événement culturel ou sportif. Même si les patients n’ont probablement pas besoin de nombre de ces services, le rôle des visiteurs et proches parents est souvent négligé. L’environnement hospitalier peut être perturbant et intimidant. Les visiteurs venus de l’extérieur ou proches en visite peuvent facilement se sentir perdus et apprécieraient d’être guidés et assistés. Un service de conciergerie pourrait être la prochaine étape, pas juste une réception qui à l’hôpital ne donne rarement guère plus de renseignements que le numéro de chambre d’un patient.
Des prestations wellness pour une expérience de soins holistiques
Bien que cela puisse paraître un peu farfelu, les hôpitaux qui souhaitent se lancer dans des expériences innovantes pourraient envisager d’ouvrir un espace wellness pour leurs patients. Á l’heure actuelle, les hôpitaux n’offrent guère plus que de basiques services de coiffure. Pour les patients qui doivent rester hospitalisés pendant un certain temps mais ne sont pas nécessairement alités, des lieux comme un spa, un salon de beauté, un centre de fitness, un restaurant ou un café ne proposant que des choses saines peuvent contribuer au rétablissement plus rapide des patients, et rendre leur séjour plus agréable.
Améliorations dans l’utilisation des technologies de l’information axée sur le service
Exploiter la technologie pour offrir des services personnalisés
Au fil du temps, le secteur hôtelier a fait de grands progrès dans le fait d’utiliser la technologie pour en apprendre plus sur leurs résidents et leurs préférences personnelles. Le but ultime étant de proposer une expérience personnalisée qui satisfasse au plus haut degré possible aux besoins de la clientèle. De nombreux hôpitaux ont des patients qui reviennent régulièrement, notamment ceux qui souffrent de maladie chronique. Pourtant, effectuer une collecte de données intelligente sur les préférences personnelles et utiliser ces informations pour améliorer l’expérience de soin n’arrive pour ainsi dire jamais. La personnalisation de l’expérience de soin peut inclure des préférences de calendrier, de goûts alimentaires, de commodités et jusqu’aux aménagements personnalisés des chambres.
Obtenir des retours en temps réel
Pour rétablir un service après rupture, et pour l’amélioration continue des services il est de la plus haute importance de recueillir des retours. De nombreux hôtels utilisent soit leurs systèmes habituels de retour, des enquêtes de satisfaction client par exemple, soit des mécanismes plus avancés permettant d’obtenir une réponse en temps réel, comme les enquêtes en ligne auxquelles on peut répondre sur des appareils mobiles. Pour les hôpitaux, recueillir des retours, quand cela arrive, dépend généralement d’un patchwork de communications personnelles, qui rend impossible l’analyse systématique de données. Là encore, la transposition directe des bonnes pratiques du secteur hôtelier au secteur des soins de santé, peut potentiellement améliorer le recueil et l’utilisation des retours des patients.
Permettre d’apprendre grâce à des partenariats
Le véritable apprentissage et le transfert de connaissances du secteur de l’hôtellerie vers l’environnement des soins de santé requièrent de nouer des partenariats intersectoriels. Ces derniers peuvent consister en une simple documentation et échange de bonnes pratiques, à des activités en commun de formation et de perfectionnement du personnel. Cependant, les partenariats et les activités en commun ne doivent pas se limiter au niveau opérationnel.
Pour aller au-delà de simples problématiques opérationnelles, des ateliers intersectoriels au niveau managérial peuvent également ouvrir la voie à une meilleure intégration de la façon de penser les services, et de tendre vers l’excellence des services, dans le monde de la santé. Par ailleurs, ils peuvent aider les hôpitaux à déterminer comment un tel virage culturel peut s’opérer grâce à des procédures organisationnelles adaptées et des principes de management orientés sur le service.